À l’aube de la 5e République, le Gabon entre dans une recomposition profonde de son paysage institutionnel. Entre les nominations ministérielles et celles issues du premier Conseil des ministres, se dessine une nouvelle cartographie du pouvoir, faite de continuités assumées, de ruptures stratégiques et de l’émergence de nouvelles figures.
Dans ce contexte, Gabon Data Dialogues, unique plateforme dédiée à la culture de la donnée au Gabon, propose une lecture en deux volets de cette architecture exécutive :
Cette analyse repose sur une méthode rigoureuse : exploitation des données officielles, croisements systématiques et volonté d’offrir une intelligence décisionnelle utile tant au débat public qu’aux institutions et aux décideurs.
L’installation de la 5e République s’est traduite par la formation d’une nouvelle équipe gouvernementale, annoncée par le Secrétaire général de la Présidence Mme Murielle Minkoue.
Mais qui compose ce gouvernement ? Quel équilibre entre continuité et renouvellement ? Quelle place pour les femmes dans cette nouvelle configuration ? Et comment se répartissent les portefeuilles entre secteurs régaliens, économiques et sociaux ?
Gabon Data Dialogues propose un décryptage détaillé, fondé sur les données, pour éclairer ces choix structurants.
Avec 30 % de femmes, l’exécutif enregistre une progression notable en matière de représentativité. Si la parité reste encore éloignée, cette proportion traduit une volonté politique affirmée d’inclusion et marque une ouverture progressive vers une gouvernance plus équilibrée.
Au-delà du genre, la composition gouvernementale révèle une stratégie de stabilité. 67% des ministres sont des figures reconduites de la transition, soit dans leurs fonctions, soit repositionnées dans de nouveaux portefeuilles. Ce choix traduit une volonté de sécuriser l’expérience et les acquis.
À l’inverse, un tiers des ministres sont de nouveaux profils, incarnant une ouverture mesurée vers le renouvellement sans rupture brutale. Ce dosage témoigne d’une recomposition pragmatique, entre sécurité institutionnelle et innovation politique.
La nouvelle architecture gouvernementale est dominée par les portefeuilles économiques (34 %) et sociaux (23 %), signe d’une orientation prioritaire vers la relance et le développement humain. Les secteurs régaliens (13 %), bien que moins représentés, demeurent stratégiques, tandis que les ministères institutionnels (13 %) traduisent une volonté de réforme de l’appareil d’État. Enfin, les portefeuilles symboliques et transversaux (17 %) soulignent l’importance accordée à l’image et à la coordination.
La répartition par typologie révèle une logique claire : continuité dans les secteurs sociaux et régaliens, renouvellement et repositionnement dans les secteurs économiques et institutionnels. Autrement dit, la stabilité est privilégiée là où l’expérience est jugée indispensable, tandis que le changement s’opère dans les domaines à forte valeur stratégique ou de modernisation.
Le second volet de l’analyse porte sur les nominations issues du premier Conseil des ministres. Avec 39,2 % de femmes, ces nominations traduisent un effort marqué pour renforcer la représentativité, même si la parité n’est pas atteinte.
La répartition par entité d’appartenance montre un recentrage assumé du pouvoir autour de la Présidence, organisée en départements techniques stratégiquement positionnés au sein du Palais. Cette architecture témoigne d’un mode de gouvernance hiérarchisé, centralisé et agile, favorisant un pilotage direct des priorités politiques.
Sur le plan fonctionnel, l’organisation est dominée par la fonction de Conseiller spécial, déclinée en plusieurs niveaux hiérarchiques. Ce modèle permet une coordination souple mais lisible, en segmentant les missions et en clarifiant la chaîne de responsabilité.
L’analyse croisée entre le gouvernement et le Conseil des ministres révèle une ligne institutionnelle claire : aucun ministre en fonction n’a été nommé conseiller présidentiel. Ce choix marque une séparation nette entre le pouvoir politique formel et les structures d’expertise et de coordination, instaurant un exécutif à deux périmètres complémentaires.
La règle de non-retour observée durant la transition du CTRI semblait exclure toute réintégration des ministres écartés. Une seule exception vient la nuancer : François Mbongo Rafemô Bourdette, ancien ministre de l’Industrie dans le gouvernement Ndong Sima 2, non reconduit dans le suivant, fait son retour dans la 5e République comme Conseiller spécial adjoint au Département Hydrocarbures, Mines, Géologie et Transformation.
Ce cas illustre une nouvelle flexibilité dans la gestion des élites : rupture politique d’un côté, recyclage stratégique de l’autre.
À l’aube de la 5e République, le pouvoir exécutif gabonais se recompose autour d’une double logique :
L’exception incarnée par François Mbongo Rafemô Bourdette illustre l’intérêt d’une lecture longitudinale et fine des trajectoires politiques, au-delà des apparences de rupture.
Promouvoir une culture de la donnée à 360° au Gabon — de la gouvernance aux secteurs sociaux, économiques, sanitaires et éducatifs — pour éclairer les décisions, structurer le débat public, renforcer l’intelligence collective et accompagner l’État et ses institutions dans la modernisation de leurs politiques et stratégies.
Dr Eric Makita
Fondateur de Gabon Data Dialogues